Pardonnez moi mon père car j'ai péché...

Il y avait un rite incontournable le samedi après midi. C'était la séance au confessionnal. Nous y allons en bande, avec les autres enfants du quartier. Dans l'église, on essayait de choisir son confessionnal. Celui à éviter absolument, c'était celui du Père Chattam. Ses sentences et condamnations étaient les plus sévère. Il avait un côté Torquemada qui nous effrayait. Physiquement, il ressemblait à Jean XXIII.

Un autre confessionnal à éviter, c'était celui de l'abbé Zinst. Sévère lui aussi. Quand on faisait une bêtise, il essayait de nous frapper avec le trousseau de clef de l'église. A cette époque, les clefs du portails ressemblaient plus à une matraque de CRS qu'à une carte à puce.

Par contre, l'abbé Trapp était plus cool, plus paternel, plus professoral.

Alors, nous nous asseyons pour attendre, sur le banc. Le confessionnal était un triplace. Le curé dans le cockpit et un passager de chaque côté. Pendant que l'un se confessait, l'autre attendait. Nous étions séparé du curé par une petite lucarne garnie d'une grille en bois. Quand il était occupé de l'autre côté, une planchette coulissante condamnait notre accès.

Quelle émotion, notamment quand nous passions avec le curé Chattam. Nous attendions sur le banc, la gorge nouée et une main d'acier nous serrait le ventre. Quand un copain sortait, il était en général décomposé. "T'en a pris pour combien" lui chuchotons nous à son passage. '5 pater, 6 avé, et trois chapelets chaque soir" Bon Dieu, il est en forme notre curé.

Vint mon tour. Je rentre m'agenouyer. Le curé confessait de l'autre côté et j'attendais. Une violente envie d'aller quekpart me prenait subitement.

Et puis, le bruit fatal. Il fermait la planchette de l'autre côté et ouvrait la mienne. Mon Dieu, que je regrettais d'avoir péché. Alors, je commençait le rituel: "Pardonnez moi mon Père car j'ai péché. Je ne me suis pas confessé depuis la semaine dernière" Jusque là, tout va bien, c'est l'intro classique.

J'avais comme chacun fait ma liste de péché comme d'autres font la liste des courses.

J'ai menti, j'ai triché, j'ai envié mes petits camarades, j'ai été inatentif en classe, j'ai désobéi à mes parents, j'ai arraché les ailes à une mouche, et les pattes aussi, tant qu'à faire, et aussi que je lui ai niqué les yeux. Non, ça c'est moi qui le rajoute.

En fait, je n'avais pas triché, pas spécialement menti, disons que j'avais quelquefois des points de vue différent. Je n'avais pas désobéi à mes parents mais par contre, c'est vrai que j'étais inattentif en classe.

Mais j'étais comme Yves Montand dans l'aveu, prêt à avouer n'importe quoi pour que ça finisse.

Et puis, notre procureur de Dieu faisait tomber sa sentence, sans appel, infaillible. 4 pater et 4 avé. Ouf, c'est encore faisable, j'ai échappé aux chapelets.

Et la planchette en bois se refermait en faisant le bruit caractéristique de la lame de guillotine tombant sur la tête de son client. Un bruit sourd et sec. Tchac.

Avec le recul, je me demande si le Bon Dieu n'avait pas de choses plus intéressantes à faire que d'écouter notre déposition. Et d'autre part, en s'accusant de fautes imaginaires, nous comettions un super péché de mensonge.

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